dimanche 19 août 2012

Mes fantômes: Ingrid Bergman


    Je devais avoir 10 ans lorsque je rencontrai Ingrid Bergman pour la première fois. J'étais aller porter la fiche des présences de ma classe au bureau du directeur, lorsque ce dernier s’empressa de quémander mon nom. Timide, je lui répondis et aussitôt il s'exclama: "Oh! Ingrid! Comme la belle Ingrid Bergman!". À 10 ans, j’en connaissais très peu sur l’histoire du cinéma et alors j'hochai la tête, tout en bafouillant un "oui... sûrement Monsieur". Il m'expliqua alors qu'il admirait beaucoup cette actrice suédoise qui avait été très populaire à une autre époque...


   Je crois que c'est à partir de cette époque que je commençai à m'imaginer des ancêtres suédois; je devais forcément avoir des aïeuls nordiques pour avoir la chance de porter ce prénom intrigant. Mais la vérité est que je n'ai jamais eu la moindre goutte de sang suédois. Ma maman, une belle brunette, avait eu le coup de foudre pour le prénom que portait une camarade de classe et plusieurs années plus tard, alors qu'elle attendait son premier enfant, elle savait qu'elle mettrait au monde une fillette aux cheveux clairs et aux yeux bleus qui porterait ce prénom. Elle n'en a jamais douté. 


     Lorsqu'à l'adolescence je travaillai sur un scénario de film amateur avec ma soeur et ma cousine, je n'hésitai pas à imaginer que le premier rôle féminin serait celui d’une jeune suédoise faite prisonnière. À la bibliothèque de mon petit village, je réussis même à dénicher un petit livre sur la Suède, dans lequel se trouvait un semblant de méthode de langue suédoise. Cette petite base, croyais-je, suffirait à rendre mon personnage crédible. C'est ainsi que dans ma tête, cette jeune suédoise crachait au visage d'un soldat en lui criant "Aldrig!" (Jamais!). C'est le seul mot suédois que j'aie jamais appris, puisque ce projet cinématographique mourut sur papier quelques jours plus tard. 


Mais rêveuse, je continuai de contempler des photos d’Ingrid Bergman en me cherchant dans ses traits. Et même encore aujourd’hui, en lisant ses mémoires, je ne peux m’empêcher d’avoir l’impression d’y lire ma vie...